Soif de l'EssenceHumaine

Soif d'Essence Humaine

Nous sentons
Le lieu

Nous aimons les murs
Créant des carrés de barrières magiques
Des obstacles pour notre conscience

Nous imaginons la réalité autre qu'elle n'est
Nous découpons le monde en petits cercles
Pour avaler goulûment le sens de notre topologie

L'espace doit avoir un but
Pour être pris en compte

Nous filons vite sur nos autoroutes
En pensant à notre abri douillet

Le béton gris, les tuyaux noirs
Les panneaux de signalisation glacials tentent de nous saluer
Mais personne ne les regarde jamais
Ils mendient une petite étreinte
Mais personne ne veut embrasser leurs angles vifs.

Pas une seule seconde
Ils ne remportent le concours de beauté
Même pas par modestie

Ce ne sont pas des espaces
Ce sont les entrailles de notre modernité…
Nous préférons l'emballage au bonbon
Les surfaces sont nos idoles.

Témoins de notre folie
Les autoroutes sont les routes de l'absurdité de la vie moderne
Des chemins que nous prenons vite pour nulle part…
ah… j'ai oublié :

Maison

Mais pourquoi sommes-nous partis, au fait ?

Pour vendre notre joie et notre temps
Pour nous transformer en rouage
Dans la machine à faire de l'argent…
Pour produire plus d'entrailles grises de béton
d'acier et de macadam…
Pour ajouter du non-sens au non-sens

Notre monde tourbillonne, se débat
Comme un loup-garou dans la boue
Nous sifflons comme un serpent dans la boîte du fakir
Nous ne voyons même pas les interstices du panier d'osier
Le fakir nous a laissés seuls, dégoûté.

Avant de partir, le fakir a demandé au serpent :
— Qu'est-ce que le monde ?
Le serpent a répondu : La Beauté.
— Ce n'est pas la question importante
Mais qu'en fais-tu ?
Et le serpent s'est tu… ssshh.

Notre monde entier est devenu
Un lieu de laideur dévastatrice…
Dès le début nous avons voulu bien faire…
Mais aveuglés par la mécanique
Nous nous sommes faits nous-mêmes un engrenage…

Nous avons extrait l'enfer des entrailles de la terre
Et maintenant nous y vivons.

Il n'y a plus de beauté nulle part…

Notre bouteille contient encore quelques gouttes
De sève de l'humanité

Nous devons trouver un Alchimiste
Pour la multiplier…

Sinon.

Et le huitième jour, il y eut le Silence.

…sssshhhh